30 juin-2 juil. 2025 Nantes (France)
Expérientialisme et bien-être impersonnel chez Parfit
Christophe Salvat  1@  
1 : Centre Gilles-Gaston Granger
Aix Marseille Université : UMR7304, Centre National de la Recherche Scientifique : UMR7304, Aix Marseille Université, Centre National de la Recherche Scientifique

Dans Raisons et Personnes (1984, trad. française 2024, ci-après RP), Derek Parfit soutient qu'il est possible de décrire sa vie et de justifier ses actions sans recourir à une référence à soi, autrement dit, de manière impersonnelle. Cette approche radicale de la philosophie de l'action repose sur une conception réductionniste de l'identité personnelle, à première vue contre-intuitive, mais qui a progressivement gagné en acceptabilité. Toutefois, si cette théorie a profondément marqué les débats sur l'identité, ses implications sur la philosophie de l'action et les théories du bien-être demeurent vivement critiquées, voire peu explorées.

 

Dans cette communication, nous commencerons par examiner la conception parfitienne de l'expérience du sujet, telle qu'elle apparaît dans RP, mais aussi dans son article Experiences, Subjects, and Conceptual Schemes (1999), où il pousse encore plus loin l'approche impersonnelle amorcée dans RP. Nous désignerons cette version de l'expérientialisme – en contraste avec l'expérientialisme des "personnes affectées" – par le terme expérientialisme impersonnel.

 

Dans un second temps, nous analyserons les implications de cette approche sur les théories du bien-être. Dans l'appendice I de RP, Parfit distingue trois grandes conceptions du bien-être : l'hédonisme, la théorie de la satisfaction des désirs et les théories de la liste objective, sans privilégier clairement l'une d'entre elles, tout en suggérant qu'une approche hybride serait préférable. Nous défendrons ici l'idée que ces trois modèles s'inscrivent dans un cadre expérientialiste classique et ne s'appliquent donc pas directement à sa propre conception. En adoptant une perspective expérientialiste impersonnelle, on peut en effet affirmer qu'un événement est bon (ou mauvais) pour une personne sans faire appel à la notion même de personne. Certains auteurs, comme Hurka, ont soutenu que la théorie hybride de Parfit relevait d'une approche objectiviste. Nous réfuterons cette interprétation et montrerons que le bien-être impersonnel ne se réduit pas au bien-être objectif.


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